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  • Choc pétrolier? Pas de panique!

    Publié le 27 Avril 20187  



    Lien vers l'article original: ici

    Les prix du pétrole ont gagné plus de 40% en l'espace d'un an. Les craintes d'un choc pétrolier rampant refont surface.
    afp.com/SPENCER PLATT

    Le prix du pétrole est en train de remonter rapidement. S'il faut surveiller son évolution, la situation n'est pas inquiétante pour le moment.

    Trop tôt pour parler de choc pétrolier ! Pourtant, on peut humer son parfum. En début de semaine, les prix du baril ont franchi pour la première fois depuis 2014, la barre des 75 dollars. Une progression de 44% en un an (+70% en deux ans). Sur fond de tensions politiques croissantes au Moyen Orient, de guerre froide larvée entre les Etats-Unis et la Russie, le marché pétrolier, anesthésié après l'effondrement des cours en 2008, se réveille.

    Aux Etats-Unis, l'essor du pétrole de schiste s'accélère encore tandis que la plupart des grandes majors relancent leurs investissements d'exploration après des années de vaches maigres. Les consommateurs, eux, s'inquiètent. En France, le prix à la pompe a gagné près de 9 centimes d'euros pour le super sans plomb depuis janvier. Les économistes, enfin, font tourner leur calculette et craignent un coup de chaud sur l'inflation et un effet récessif sur la croissance. Décryptage avec Pierre Terzian, économiste et directeur de Pétrostratégies.

    Les cours de l'or noir sont au plus haut depuis quatre ans. Cette hausse tient-elle à un déséquilibre durable du marché ou à l'accentuation des tensions géopolitiques ?

    Les deux ! Lorsque je fais la liste des facteurs qui poussent théoriquement les prix du pétrole à la hausse, je suis même étonné que les cours ne soient pas plus élevés. Citons-les ! La demande mondiale dynamique ; l'accord de limitation de production entre l'Opep et la Russie ; la volonté de l'Arabie saoudite de tirer les prix vers le haut pour faciliter l'introduction en Bourse de sa compagnie nationale Aramco ; la chute drastique de la production au Venezuela. Et évidemment, les tensions politiques majeures aux Moyen Orient, en Syrie, en Iran. Il y a quelques jours, le mouvement chiite yéménite des Houthis a mené à l'aide d'un drone une attaque contre une installation du géant pétrolier Aramco dans le sud de l'Arabie. Dans ce contexte, je ne vois pas pourquoi, les cours du pétrole ne continueraient pas encore de progresser un peu.

    L'ultimatum des Etats-Unis aux partenaires européens concernant l'accord sur le nucléaire iranien fixé le 12 mai peut-il aviver les tensions ?

    Evidemment ! Lors de la visite d'Emmanuel Macron en début de semaine à Washington, Donald Trump a encore qualifié cet accord de "dément" et "ridicule", martelant qu'il n'aurait jamais dû être conclu. Si les Etats-Unis sortent de l'accord et remettent en place un système de sanctions, cela va forcément peser sur les exportations de pétrole iranien. De grandes compagnies comme Total seraient obligées de quitter le pays. Inévitablement, les prix de l'or noir serait affecté.

    L'Agence Internationale de l'Energie (AIE) a encore récemment tiré la sonnette d'alarme, pointant du doigt le manque criant d'investissements dans de nouveaux gisements au cours des années passées. Est-ce réellement inquiétant ?

    Cette inquiétude est très largement exagérée. Evidemment, les montants en valeur des investissements dans l'exploration de nouveaux gisements ont nettement chuté, notamment dans les années 2015 et 2016. Mais en même temps, les coûts de développement, de recherche ont aussi beaucoup diminué de l'ordre de 35 à 40%. Si bien qu'en volume réel de dépenses engagées, la diminution est bien moins sévère qu'on pourrait le croire. Sortons du fantasme d'une éventuelle pénurie de pétrole à l'origine d'une explosion des prix comme entre 2003-2005. La situation du marché n'est absolument pas comparable. Avec la révolution du pétrole de schiste aux Etats-Unis notamment dans le bassin de Permien, la production américaine croît très rapidement : elle pourrait dépasser les 11 millions de barils par jour cette année. L'Amérique est en train de devancer l'Arabie saoudite et la Russie. Elle sera le premier producteur mondial d'or noir.

    Justement, vous parlez des Etats-Unis qui profitent de cette remontée des cours. Pourtant Donald Trump a encore récemment accusé l'Opep de manipuler les cours ?

    Donald Trump n'en est pas à sa première contradiction. Evidemment que les pétroliers américains profitent de la situation. Aujourd'hui, les coûts de production des pétroles de schiste tournent autour de 40-50 dollars le baril. Ils sont donc très rentables compte tenu des prix sur les marchés. Mais Trump n'a qu'un objectif en tête : les élections de mi-mandat à l'automne prochain. Ses déclarations à l'emporte-pièce contre l'Opep servent seulement à caresser dans le sens du poil une partie de son électorat populaire, affectée par la hausse sensible des prix de l'essence. Aux Etats-Unis, à la différence de l'Europe, la sensibilité des prix à la pompe aux cours mondiaux du pétrole est très forte.

    Finalement qui est le vrai pilote du marché pétrolier ?

    Clairement l'Arabie saoudite. Le royaume a radicalement changé de stratégie en l'espace de trois ans. Rappelez-vous ! A l'été 2014, il déclenche une guerre des prix pour casser l'essor des pétroles de schiste aux Etats-Unis. Mais dès avril 2016, les Saoudiens sont prêts à signer un accord de limitation de production avec la Russie et l'Iran pour faire remonter les cours. Ils finalisent cet accord en novembre 2016. Que s'est-il passé entre-temps ? Le prince héritier Mohammed ben Salmane a décidé d'ouvrir une partie du capital de Saudi Aramco, la compagnie pétrolière nationale. Et il lance imprudemment le chiffre de 2000 milliards de dollars de valorisation supposée de l'entreprise. Un chiffre qui tombe de nulle part. Même les dirigeants d'Aramco sont surpris. Tout doit donc être mis en place pour faire remonter les cours de l'or noir et atteindre cet objectif. En le faisant, ils savent très bien qu'ils encouragent la production américaine de pétrole de schiste. Un comportement totalement paradoxal.

    Ces tensions peuvent-elles réellement freiner la croissance mondiale ?

    Tant que la remontée des cours est graduelle, l'impact est absorbé et la reprise mondiale protégée. Cela étant, au-delà d'un certain seuil - et nous n'en sommes pas très loin - les prix élevés du pétrole commenceront à avoir un impact négatif sur la demande. C'est pourquoi certains pays producteurs, dont la Russie, ne sont pas forcément d'accord sur la stratégie saoudienne. Moscou ne suivra pas les yeux fermés Riyad.


    © l'expansion.fr

     
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