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  • L'Europe, victime du boom américain du gaz de schiste ?

    Publié le 12 Mai 2014  


    Exploitation du gaz de schiste aux Etats-Unis| Keith Srakocic/AP

    Quel impact l'exploitation massive des hydrocarbures de schiste aux Etats-Unis a-t-il sur l'économie mondiale ? C'est à cette question – qui a déjà donné lieu à de nombreux travaux – qu'une mission parlementaire créée en juillet par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale a souhaité répondre dans un rapport présenté mercredi 30 avril. Laissant volontairement de côté les questions environnementales qui n'étaient pas dans son cahier des charges. 

    Après avoir auditionné une cinquantaine de personnes « de tous bords » et compulsé chiffres et études disponibles, les onze députés membres de la mission n'ont plus aucun doute : le gaz de schiste est bel et bien une révolution aux Etats-Unis, qui aura, et a déjà, des « conséquences désastreuses » sur l'économie européenne. 

    TOUT SAUF UNE BULLE ÉNERGÉTIQUE


    Réfutant l'idée d'une bulle énergétique, le rapport estime « qu'en l'état des connaissances actuelles, le scénario d'un phénomène durable est de très loin le plus probable » et « qu'il serait donc irresponsable de la part des décideurs politiques de ne pas en anticiper les conséquences ». Le tableau dressé aux Etats-Unis est largement plus optimiste que celui livré en février par l'Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri-Sciences Po dont les chercheurs estimaient en substance que le gaz de schiste n'était pas une solution miracle outre-Atlantique. 

    Pour Frédéric Barbier, député (PS) du Doubs et rapporteur de la mission parlementaire, « les hydrocarbures de schiste sont bel et bien l'étincelle qui a rallumé la croissance américaine » avec un prix du gaz tombé à 3,7 dollars par million de British Thermal Unit (MBTU, unité équivalente à environ 25 mètres cubes) sur le marché américain en 2013 contre 10-12 dollars en Europe et 16 dollars en Asie. Cet avantage compétitif, selon les travaux de la mission, profite au pays, en sécurisant ses approvisionnements énergétiques ; à ses consommateurs dont la facture de gaz a baissé de 30 % entre 2005 et 2012 ; aux industriels avec un prix de l'électricité équivalent à 40 % du prix payé par les Européens. Sans oublier l'emploi : le chiffre de 600 000 emplois (directs et induits), assez controversé, est repris par les députés. 

    BOOM DE LA PÉTROCHIMIE AMÉRICAINE


    Cette révolution, insiste largement le rapport, a conduit à un véritable boom de l'industrie pétrochimique américaine. L'extraction du gaz de schiste a permis la hausse de 38 % de la production d'éthane – matière première très importante pour la pétrochimie – entre 2008 et 2012, dont le prix a, du coup, baissé de 55 %. Permettant aux Etats-Unis de tailler des croupières aux Européens : le coût de production de l'éthylène (à partir de l'éthane) est de 350 dollars la tonne en Amérique du Nord et au Moyen-Orient contre 1 100 dollars la tonne en Europe (à partir du naphta issu, lui, de la distillation du pétrole). 

    Bref, le Vieux Continent est perçu comme le grand perdant de ce nouveau jeu énergétique. Avec des conséquences déjà décrites : les Etats-Unis exportent massivement leur charbon devenu moins compétitif sur leur territoire que le gaz, ce qui, combiné avec le développement sur le réseau des énergies renouvelables, abaisse fortement la rentabilité des centrales à gaz européennes. 

    Quelles préconisations tirer de ce constat ? Même si Frédéric Barbier n'a pas oublié la déclaration de François Hollande, le 14 juillet 2013, confirmant que sous son quinquennat « il n'y aura pas d'exploration et d'exploitation du gaz de schiste en France », le député appelle tout de même à « en finir vraiment avec ce débat », sous-entendu mal engagé depuis le départ. 

    CHIFFRES FARFELUS SUR LES RÉSERVES


    L'élu reste prudent. Il sait que beaucoup de chiffres farfelus ont été donnés sur l'état des réserves de gaz de schiste dans le monde. En Europe, selon la mission, l'enjeu d'une exploitation n'en vaut pas la chandelle. Produire du gaz de schiste « conduirait en effet à un taux de dépendance en gaz hors UE de 80 % en 2035 contre 90 % sans production de gaz de schiste », selon une analyse réalisée par Bruxelles et reprise dans le rapport. Pour l'Hexagone, il souhaite néanmoins le « lancement d'un petit bout de recherche », qui pourrait être réalisé par la compagnie minière nationale qu'Arnaud Montebourg, ministre de l'économie, veut créer. « Une fois les tests réalisés, on saura si les coûts de production sont bien ceux avancés par les professionnels que nous avons auditionnés, de l'ordre de 8-9 dollars/Mbtu, soit seulement 1 à 2 dollars de moins que le prix de marché actuel, bien loin du prix américain. Et donc inintéressants. » 

    Décidée néanmoins à épauler l'industrie française et européenne, la mission préconise une véritable réforme du marché européen du carbone, dont le prix de la tonne (entre 4 et 5 euros) ne dissuade guère les industriels de brûler du charbon. « Un prix plus élevé permettrait au gaz de redevenir compétitif », indique M. Barbier, conscient là aussi que cette réforme est un serpent de mer, qui jusqu'à maintenant n'a pas abouti. 

    Enfin, pour protéger les groupes français « énergo-intensifs » (sidérurgie, pétrochimie, raffinage, etc.), la mission propose plusieurs pistes pour les aider à affronter la vague américaine : exonérations de charges (comme l'a autorisé Bruxelles en matière de financement des renouvelables), réorientation de la taxe sur la consommation finale d'électricité qui bénéficie aux territoires et dont une partie des recettes pourrait être dirigée vers les énergo-intensifs ou encore des conditions d'accès privilégiées au nucléaire et à l'hydraulique.

    © Marie-Béatrice Baudet - Le Monde.fr


     
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